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"Un prix Nobel hongrois"

Un prix Nobel dégradé en matraque 
 
par Norbert Haklik 
paru dans Magyar Nemzet, le 21 octobre 2002  
 
Finalement, nous aussi, les Hongrois, avons un écrivain lauréat du prix Nobel. C’est une chose magnifique et digne de louanges, car le prix étend sa lumière non seulement sur le lauréat lui-même, mais sur toute la littérature hongroise. Il serait normal, si en Hongrie tout le monde se réjouissait également de la distinction de Kertész, sans égard au fait que il y aurait eu déjà jusqu’à maintenant un bon nombre d’autres écrivains hongrois qui auraient été également dignes du prix Nobel.  
La nouvelle de la distinction honorifique d’Imre Kertész a suscité cependant des sentiments ambiguës en plusieurs personnes. Et ce phénomène ne s’explique pas par l’observation formulée par Miklós Tamás Gáspár, le philosophe qui s’intéresse si vivement à l’origine ethnique et à la confession religieuse des autres, qui – en se moquant de tout ce qui est politiquement correct – a écrit les phrases suivantes dans le Magyar Hírlap : « Imre Kertész écrivain hongrois a reçu le prix Nobel. Il est juif. » 
Oui : Imre Kertész est un écrivain juif. Il est, en fait, autant juif, que hongrois. Dans la plupart de ses œuvres, il affronte les problèmes de l’identité juive d’Europe Centrale, desquels un auteur non-juif difficilement pourrait parler d’une façon authentique. Kertész fait tout cela en langue hongroise, en puisant de l’histoire des Juifs de Hongrie, donc l’arrière-pays spirituel et la base linguistique, appelés « la culture hongroise », ont également contribué à son prix Nobel. Le prix de Kertész enrichit beaucoup la culture hongroise, d’autre part pourtant la culture hongroise a, elle aussi, enrichi Imre Kertész, pour ce qu’il arrive au niveau de remporter la distinction la plus prestigieuse de la vie littéraire internationale. 
Peut-être, l’opinion publique littéraire hongroise ne reconnaît pas Kertész dans une mesure digne de ses mérites. Mais souvent il se montre, lui aussi, bien ingrat envers la nation dont il utilisait la culture pour construire son œuvre reconnue maintenant avec ce prix. En donnant des interviews à l’étranger, il fait souvent des allusions à une prétendue xénophobie ou même antisémitisme des Hongrois – devant un publique d’élite intellectuelle d’Europe Occidentale, qui se laisse terrifier avec prédilection par les histoires concernant le barbarisme présumé des nations moins heureuses. Ce publique occidental trouve sans doute un fort sens de volupté en écoutant ces affirmations, mais elles sonnent au même temps de façon extrêmement irritante pour ceux qui vivent dans un milieu, où les forces postcommunistes, coalisées avec un parti dit Libéral, représentant surtout un libéralisme des scandales, utilisent systématiquement l’accuse de l’antisémitisme, comme une matraque spirituelle, contre leurs adversaires politiques. Après que la nouvelle de son prix Nobel fut rendue publique, Kertész a de nouveau formulé des déclarations suivantes, en disant par exemple à Die Zeit qu’ « en Hongrie règne un antisémitisme explicite » – bien que depuis il n’ait oublié de faire aussi des gestes e sympathie envers la culture et la langue hongroise, un fait qui démontre indubitablement les signes d’un certain « équilibre » de son pensée par rapport aux précédents. En plus, tout récemment, Imre Kertész a dit qu’il le trouve bien regrettable que la nouvelle de son prix Nobel ait suscité des controverses. A ce point nous pouvions espérer sérieusement que tout le monde comprît le sens de l’allusion et que les protagonistes de notre vie publique n’auraient plus utilisé le prix Nobel en fonction de fouet, mais auraient lui rendu son honneur. 
Mais à ce point István Eörsi*, dont le nom est devenu pour aujourd’hui un synonyme de l’hystérie paranoïde anti-hongrois, s’est permit d’écrire dans l’hebdomadaire libéral « Hetek » (le 18 octobre) à propos du prix de Kertész : « La droite hongroise actuellement s’est réduite au niveau de la fosse de latrines ! » Nous sommes arrivés donc à ce point : István Eörsi, un représentant de marque de la presse libérale, toujours si sensible aux problématiques traitées par Kertész, réduit l’honneur accordée au premier prix Nobel hongrois au niveau de massue politique. C’est a dire, il transforme en un instrument de la haine l’honneur d’un écrivain qui a toujours hausser sa voix justement contre les phénomène de haine dans tous ses œuvres.  
 
* István Eörsi, considéré aussi comme un auteur important de la vie littéraire hongroise, est connu d’ailleurs pour ses publications fréquents et d’une tonalité souvent similairement « radicale », qu’il fait paraître dans un bon nombre de quotidiens et d’hebdomadaires « libéraux », c’est à dire, proches de l’SZDSZ (le Parti Libéral hongrois). Il est en autre l’oncle d’un député parlementaire du même parti.  
 
 
 
Un prix Nobel hongrois 
 
par Matild Torkos  
paru dans Magyar Nemzet, le 12 octobre 2002 
 
Nous devons être vraiment fiers de notre littérature, les Hongrois, puisque dans cette petite nation refermée dans sa langue, Imre Kertész a dû remporter un prix Nobel de Stockholm, pour devenir finalement connu et reconnu dans son propre pays.  
L’écrivain Imre Kertész n’est pas vraiment connu par les lecteurs et même un bon nombre des lettrés se trouveraient en embarras s’ils devaient rapidement composer un compte rendu de ses œuvres. Bien entendu, tout cela ne diminue aucunement les mérites littéraires d’Imre Kertész. Car un des œuvres principaux d’Imre Kertész, l’Etre sans destin , souvent rappelé pendant ces jours à propos du prix Nobel, aurait dû être familier à tous les groupes cultivés de la société hongroise depuis au moins un quart de siècle.  
Qui sait, combien d’enseignants de lettres de nos lycées se précipiteront maintenant aux bibliothèques, parce que leurs élèves, se préparant au bac, leur demanderont : « Pourquoi ne nous enseignez-vous rien de Kertész ? » 
D’après les mots d’un écrivain contemporain hongrois, Péter Nádas, « l’opinion publique hongroise n’a pas voulu apercevoir et reconnaître l’importance » du chef-d’œuvre de Kertész, l’Etre sans destin. Avec quelle raison s’expliquera le fait, que l’Association Nationale des Ecrivains hongroise a laissé la nouvelle sensationnelle sans un mot de commentaire jeudi passé, et que l’Agence de Nouvelles Hongroise n’a pu extorquer un interview qu’à l’Association des écrivains polonais, duquel on a compris d’ailleurs que, similairement aux Hongrois, les Polonais ne connaissent pas non plus l’œuvre de Kertész ? Similairement, aussi les salutations et les reconnaissances officielles, rendues connues au publique, ont révélé très clairement, qu’à part d’un petit nombre d’amis écrivains, Kertész n’a reçu que les félicitations de politiciens. 
Il est également remarquable la façon dont nos collègues journalistes social-libéraux ont célébré l’auteur lauréat du prix Nobel. Dans un de ces quotidiens, un philosophe au style érudit s’est pressé à constater immédiatement, dans le titre même de son article, que le protagoniste des célébrations – était Juif. Il a, en fait, retenu important de souligner ce fait à coté de celui de l’attribution du prix. D’après Miklós Tamás Gáspár, nous devront maintenant nous confronter avec une situation ambivalente dans laquelle,n pour l’opinion publique internationale, il s’agira « d’un jubilé de la culture hongroise », tandis que pour les Hongrois il ne sera que « du devoir pénible, du travail fatigant et d’un réveil effrayant ».  
Un autre quotidien a remarqué dans son éditorial, que « le mur qui sépare la littérature d’un petit peuple, refermé dans sa langue (…) de l’opinion publique de la littérature du monde, naturellement ne peut être franchi tout d’abord aux moyens du style et du langage. L’attribution du prix a été le résultat de toute une série de processus politiques, culturels et littéraires complexes. » 
Ce sont pourtant des réflexions rassurantes : il ne sera donc si péniblement difficile pour les Hongrois d’affronter cette bonne nouvelle et même les enseignants de lettres, se permettant encore d’occuper leurs cathèdres, se soulèveront peut-être : ce n’a pas été, alors, forcément la faute de leur évaluation erronée des valeurs littéraires… L’œuvre d’Imre Kertész dès maintenant entrera sûrement à faire partie du matériel scolaire obligatoire, même si, selon ses propres mots, « il n’écrit pas pour ceux, dont il parle la langue ».  
Et à la question « pourquoi nos candidats précédents, Móricz, Illyés, Weöres, Mészöly, Füst, ou même Esterházy* n’ont pu obtenir le prix Nobel ? », trouvera-t-on ainsi une réponse hypothétique, à savoir que, probablement, à leur époque les processus politiquo-littéraires n’étaient pas encore assez mûrs pour qu’un fils de cette nation refermée dans sa langue puisse être daigné à cette honneur.  
D’après l’information d’un de nos journaux, les conseilleurs hongrois auraient proposé la candidature d’une autre personne au lieu de Kertész… Malgré cela, nos collègues journalistes libéraux ont raison à nous dire que nous devons nous réjouir sans un ombre d’ambiguïté du succès d’Imre Kertész. Pour pouvoir ainsi faire, nous devons nous forcer à ne pas penser à la force de la diplomatie littéraire – de cette façon nous pourrons être parfaitement et franchement contents du succès, considéré comme le notre, remporté par notre compatriote, Imre Kertész écrivain hongrois. 
 
 
* Une énumération bien impressionnante de grands écrivains hongrois du XXe siècle… 

 

(c) Agnes Bencze - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 22.10.2002
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